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Algues vertes, de nouvelles mesures obligatoires en Bretagne

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Suite à un jugement du tribunal administratif de Rennes en juin, le préfet de la Région Bretagne s’est vu contraint de renforcer le programme d’actions régional nitrates, sur le volet des algues vertes. Un arrêté liste cinq nouvelles mesures à déployer. Des zones soumises à contraintes environnementales sont également créées. Décryptage.

Algues vertes, de nouvelles mesures obligatoires en Bretagne
Algues vertes, de nouvelles mesures obligatoires en Bretagne

L’efficacité des plans de lutte contre les algues vertes, Plav, a plusieurs fois été remise en cause en 2021. Suite à la publication d’un arrêté , le 18 novembre, des mesures complémentaires doivent être déployées en Bretagne, dans les huit baies concernées. Cela fait suite à un jugement du tribunal administratif de Rennes, en juin, qui enjoignait le préfet de Région à ajouter un volet « algues vertes », au plan d’actions régional nitrates, PAR. L’instance avait été saisie par l’association Eau et Rivières de Bretagne, qui s’alarmaient de l’absence de résultats sur le terrain.

Contrôle de l’étanchéité des ouvrages de stockage

Algues vertes, de nouvelles mesures obligatoires en Bretagne - © D.R.
Algues vertes, de nouvelles mesures obligatoires en Bretagne - © D.R.

L’arrêté liste cinq mesures, à mettre en place dès à présent, et de manière obligatoire, sur les huit baies. La première concerne les ouvrages de stockage des effluents d’élevage. Des contrôles techniques de leur étanchéité devront désormais être réalisés, avant 2024 pour les sites d’exploitation situés dans les sous bassins versants prioritaires ; et avant septembre 2026 pour les sites d’exploitation situés hors de ces bassins (voir carte). Un cahier des charges a été élaboré pour la mise en œuvre de ces diagnostics. En cas de défaut d’étanchéité, des travaux doivent être engagés au cours de l’année qui suit. Les diagnostics sont à réaliser, ensuite, tous les dix ans. Un bilan de la réalisation de l’ensemble de ces contrôles techniques sera présenté chaque année, dès 2025, en comité nitrates.

Des seuils pour les reliquats azotés

L’arrêté fixe également un seuil d’alerte pour les reliquats azotés post absorption (RPA), égal à la valeur la plus basse parmi les deux référence suivantes : 80 kg d’azote/ha, ou le percentile 90 calculé sur le périmètre d’un bassin connaissant d’importantes marées vertes sur les plages. En cas de dépassement de ces seuils, l’exploitant doit établir, dans les trois mois suivant, un plan d’action listant des pratiques agronomiques à mettre en œuvre pour réduire le niveau de RPA, qu’il transmet à la Direction départementale des territoires. Il s’engage par ailleurs à redescendre sous les seuils fixés au cours des trois prochaines années. Si ce n’est pas le cas, « le préfet se réserve la possibilité : soit de prescrire directement un ensemble de mesures agronomiques visant à réduire les risques de fuite d’azote, soit de demander la poursuite du plan d’action sur trois années supplémentaires, moyennant ou non l’adaptation de certaines mesures ».

Limiter le surpâturage

Par ailleurs, des bandes enherbées larges d’au moins dix mètres, contre cinq actuellement en Bretagne, devront être implantées le long des cours d’eau. Elles devront être en place au plus tard le 31 décembre 2022. Pour limiter les situations de surpâturage, les éleveurs de vaches laitières ne devront pas dépasser le seuil de 900 UGB.JPP/ha/an (unité de gros bétail par jour de présence au pâturage), d’ici au 1er septembre 2023. Enfin, l’arrêté indique que « la dérogation à l’obligation d’exporter, hors des bassins versants connaissant d’importantes marées vertes, des produits transformés issus d’effluents ayant subi un process de méthanisation, est supprimée pour les exploitants concernés par l’obligation de traitement, quel que soit le lieu d’implantation du méthaniseur ».

Instauration de zones soumises à contraintes environnementales

Par ailleurs, en plus de ces cinq mesures, l’arrêté met en place un zonage pour des zones soumises à contraintes environnementales (ZSCE). Le dispositif était promis depuis l’entrée en vigueur, il y a dix ans, des Plav, mais n’avait jamais été concrétisé. Pour l’heure, le texte acte juste l’instauration du dispositif. D’autres arrêtés viendront préciser, pour chaque bassin, les mesures à mettre en place. Des objectifs à atteindre seront indiqués. Les agriculteurs ne les ayant pas atteint au bout de trois ans seront sanctionnés.

Eau et rivières de Bretagne mitigée

« Nous sommes plutôt satisfaits de voir que les algues vertes ont désormais un statut particulier, avec des mesures spécifiques, dans le PAR, d’autant plus que les Plav ne sont pas suffisants », réagit Estelle Le Guern, chargée de mission agriculture au sein de l’association Eau et Rivières de Bretagne. Si elle qualifie la mesure concernant le surpâturage « d’intéressante », elle regrette globalement le caractère peu contraignant des différentes actions listées dans l’arrêté, notamment en ce qui concerne les reliquats azotés. « Pour les bandes enherbées, le maintien de bandes de dix mètres était déjà en place sur certains territoires, leur mise en œuvre ne devraient donc concerner que peu d’agriculteurs au final, essentiellement dans le Finistère », poursuit la chargée de mission. D’autres mesures étaient par ailleurs attendues par l’association. « Nous regrettons notamment l’abandon de la couverture des sols en interculture courte, pour éviter le lessivage », précise Estelle Le Guern. Une mesure à laquelle les chambres sont, pour leur part, opposées. « Même si nous sommes déçus de la portée de ces mesures, elles représentent quand même des avancées. Nous allons être très attentifs aux mesures qui vont être annoncées pour les ZSCE, nous n’avons pas encore de garantie à ce sujet là », conclut la chargée de mission.