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Fonds d’indemnisation des victimes de pesticides, le décret d’application est publié

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Le fonds d’indemnisation des victimes de pesticides, dont la création a été actée dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020, peut enfin voir le jour : un décret paru au Journal officiel du 29 novembre 2020 en définit les modalités d’organisation et de fonctionnement. 

La nouvelle version du plan Écophyto 2030 sera présentée avant « la fin du mois », a déclaré Matigno - © D.R.
La nouvelle version du plan Écophyto 2030 sera présentée avant « la fin du mois », a déclaré Matigno - © D.R.

Il se faisait attendre. Le décret d’application relatif à l’indemnisation des victimes de pesticides est enfin paru au Journal officiel du 29 novembre 2020. La création de ce fonds au sein de la Caisse centrale de mutualité sociale agricole (CCMSA) avait été actée dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020, après de longs débats parlementaires.

Pour les demandes déposées à partir du 1er janvier 2020

Le décret paru définit les modalités d’organisation et de fonctionnement du fonds, ainsi que les modalités d’instruction des demandes et règles d’indemnisation des victimes. Ses dispositions sont applicables aux demandes déposées à compter du 1er janvier 2020, ou en cours d’instruction à cette date, à l’exception de celles ayant donné lieu à une décision avant la publication du décret.

Dans un communiqué de presse en date du 30 novembre, le Gouvernement précise que ce fonds permet de répondre à trois objectifs majeurs :

• faciliter la reconnaissance des maladies professionnelles liées aux pesticides en rendant la procédure plus simple, plus rapide et plus juste ;

• indemniser plus équitablement les exploitants agricoles grâce à un complément d’indemnisation qui rapprochera leurs modalités d’indemnisation de celles des salariés ;

• indemniser, au titre de la solidarité nationale, les exploitants agricoles retraités d’avant 2002 et les enfants exposés pendant la période prénatale du fait de l’activité professionnelle de leurs parents, qui n’étaient jusqu’ici pas éligibles aux réparations des régimes accidents du travail maladies professionnelles (AT/MP).

“Pour assurer une équité de traitement de tous les professionnels, un comité de reconnaissance des maladies professionnelles unique est chargé d’harmoniser pour l’ensemble du territoire national les décisions de reconnaissance en maladie professionnelle”, précise le Gouvernement.

Un site internet dédié

Les demandes des personnes exposées du fait de leur activité professionnelle doivent être déposées auprès de leur caisse de sécurité sociale. Celles concernant les enfants exposés durant la période prénatale doivent l’être directement auprès du fonds.

Afin d’accompagner les victimes dans leurs démarches, un site internet dédié a été mis en ligne. Une campagne de sensibilisation des organismes de sécurité sociale et autres relais, professionnels de santé et associations notamment, est également lancée afin de promouvoir l’accès à ce dispositif auprès des publics concernés.

Phyto-Victimes appelle au recensement

Dans un communiqué daté du 30 novembre, l’association Phyto-Victimes invite chaque personne qui se sent concernée par ce nouveau dispositif à se faire recenser auprès d’elle. “N’y allez pas seul est sans accompagnement”, recommande-t-elle. L’association siègera au conseil de gestion du fonds d’indemnisation.

Phyto-Victimes reconnaît que “ce fonds devrait permettre une meilleure prise en charge des victimes des pesticides”, mais regrette qu’il “ne donne pas lieu à une réparation intégrale des préjudices subis par les victimes, ni aucune amélioration d’indemnisation pour les salariés”. Enfin, l’association déplore “que l’État reste absent du financement”. Le fonds sera en effet financé par les cotisations AT/MP et par le relèvement de la taxe de phytopharmacovigilance. Pour Phyto-Victimes, la création du fonds “n’est qu’une étape : il faudra suivre, améliorer, corriger ce nouveau dispositif”.

L’UIPP plaide pour le principe d’un abondement

L’UIPP, l’Union des industries de la protection des plantes, a également réagi le 30 septembre. Dans un communiqué, elle fait part d’un “fonds d’indemnisation légitime mais au financement peu cohérent”. L’Union met en avant, comme Phyto-Victimes, l’absence de l’État dans le financement, alors même qu’il encadre la mise en marché des produits concernés. “Cette prise de position est contradictoire avec les recommandations des rapports des corps d’inspections (IGF, IGAS et du CGAAER*) préconisant un financement tripartite.” L’UIPP appelle à l’application d’un abondement corrélé aux besoins réels du fonds. Elle s’étonne enfin que seuls les fabricants des produits phytopharmaceutiques soient mis à contribution, alors que la définition réglementaire des pesticides est plus large que ces spécialités.

* IGF : Inspection générale des finances ; IGAS : Inspection générale des affaires sociales ; CGAAER : Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux.