Révision de la directive cadre pesticides, la Commission opte pour un règlement
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Suite à l’hétérogénéité de mise en œuvre de la directive relative à une utilisation des pesticides compatible avec le développement durable, la Commission européenne a décidé de se tourner à présent vers un règlement. Le point sur sa proposition qui devait être présentée fin mars et qui a fuité.
La proposition de la Commission européenne de révision de la directive 2009/128/CE relative à une utilisation des pesticides compatible avec le développement durable devait être présentée fin mars 2022. Le document, qui a fuité, se présente finalement sous la forme d’un règlement. Ce texte et ses annexes devront donc, une fois validés par le Parlement et le Conseil européen, d’ici un an au mieux, être appliqués tel quel par l’ensemble des États membres, contrairement à la directive 2009/128/CE qui a conduit à des transpositions nationales hétérogènes.
Cette nouvelle version réglementaire européenne sur l’utilisation des pesticides compatible avec le développement durable doit entre autres prendre en compte les objectifs du Green deal et de ses volets « Farm to fork » et « Biodiversité », qui visent notamment, d’ici à 2030, la réduction de 50 % de l’usage des produits phytosanitaires et du risque correspondant, ainsi que de l’usage des solutions les plus dangereuses. La France, avec son plan Écophyto, la mise en place de formations et de certifications, la séparation du conseil et de la vente, l’obligation d’un conseil stratégique… ne semble pas faire partie des mauvais élèves.
Viser une réduction collective de 50 % des pesticides
Dans sa proposition de règlement, la Commission suggère que chaque État membre contribue, d’ici à 2030, à la réduction européenne de 50 % de l’utilisation et des risques de produits phytosanitaires de synthèse d’une part, et de l’usage des produits les plus dangereux d’autre part. Et ce, par l’adoption de deux objectifs nationaux, par rapport à une période de référence correspondant à la moyenne des années 2015, 2016 et 2017.
Ces objectifs nationaux ne peuvent pas être inférieurs à 25 %. Ils peuvent ne pas atteindre 50 % si l’État membre justifie de réductions d’utilisation supérieures à la moyenne européenne entre 2011-2013 et 2015-2017. Un État membre peut également fixer des objectifs de réduction de 45 % s’il démontre qu’à l’avenir, le recours à des produits chimiques s’avèrent nécessaires pour lutter contre de nouveaux ravageurs ou contre des bioagresseurs résistants. Ces objectifs seront surveillés par la Commission.
Des directives communes pour les plans nationaux
La Commission décrit ce que doit contenir au minimum le plan national de chaque État membre, qui doit par ailleurs faire préalablement l’objet d’une consultation publique, avec l’explication de sa cohérence avec la stratégie nationale liée à la Pac. Chaque plan national doit se focaliser sur une liste d’au moins cinq substances actives de pesticides, en précisant les cultures concernées, les alternatives envisagées et leurs objectifs progressifs d’utilisation, en expliquant comment résoudre les freins à leur recours. Chaque État membre est amené à fixer des objectifs de pourcentages d’utilisation de méthodes alternatives et à présenter les mesures incitatives, y compris les mesures financières, mises en œuvre pour y parvenir. Un focus sur au moins trois cultures est par ailleurs demandé. Deux ans et demi après l’entrée en vigueur du règlement, les avancées de chaque État membre devront être rendues publiques et présentées chaque année à la Commission européenne, qui pourra faire des recommandations.
Justifier les traitements
Toutes les interventions devront désormais être justifiées, inscrites dans un registre électronique et conservées durant trois ans. L’utilisation des produits est réservée aux professionnels détenteurs d’un certificat et consultant chaque année un conseiller indépendant. Les distributeurs devront également obtenir un certificat après une formation et le matériel d’application devra être inspecté.
L’utilisation de produits dans les zones sensibles, telles que Natura 2000, devient interdite, avec dérogations possibles. Enfin, des règles spécifiques doivent être mises en œuvre pour protéger les milieux aquatiques et les aires d’alimentation de captage en vue de préserver l’eau potable.
Priorité à la lutte intégrée, avec des règles précises par culture
Les principes de la lutte intégrée, déjà inscrits dans la directive 2009/128/CE, sont remis en avant et doivent primer. La Commission propose que les États membres établissent, par culture, un registre précis des principes de lutte intégrée à suivre, comprenant entre autres les produits et méthodes alternatifs à utiliser. Ces principes seront publiés et ouverts à tous les États membres. Ces derniers pourront dès lors utiliser les mêmes principes lorsque leurs zones présentent les mêmes conditions pédo-climatiques.