Biocontrôle : les leviers pour atteindre 30 % du marché en 2030 malgré une baisse du CA en 2023

« Les grandes cultures couvrant la grande majorité de la sole avec près de 9 hectares sur 10 cultivés en France, c’est par elles que l’accélération du déploiement du biocontrôle doit se réaliser. La moindre hausse sur ce secteur aura un effet important sur le développement du secteur » indique Céline Barthet, présidente d’Alliance biocontrôle, à l’occasion de la diffusion du baromètre 2023 le 14 janvier 2025 à l’occasion du Salon des cultures spécialisées, Sival, qui se tient à Angers (Maine-et-Loire) du 14 au 16 janvier 2025.

Baisse du chiffre d’affaires de 12 % entre 2022 et 2023

Malgré la volonté d’accélérer cette transition, les chiffres récents montrent que des efforts supplémentaires sont nécessaires. En effet, la structure maintient l’objectif d’atteindre 30 % en valeur du marché des produits phytopharmaceutiques d’ici à 2030. Les données de 2023 indiquent une part de marché de 9 %, en recul par rapport à 2022 où elle était de 10 %. Les ventes de solutions de biocontrôle en France se chiffrent à 245 M€ en 2023, contre 278 M€ en 2022, soit une baisse de 12 %. « Cette diminution des ventes s’explique principalement par les importantes quantités de produits encore stockées dans les exploitations agricoles et les circuits de distribution, ainsi que par l’évolution des prix d’achat », analyse Denis Longevialle, directeur d’Alliance biocontrôle.

Par ailleurs, la part de marché du biocontrôle varie significativement selon le segment concerné :

• 41 % des ventes de molluscicides,
• 33 % des ventes d’insecticides,
• 13 % des ventes de fongicides,
• 3 % des ventes d’herbicides.

Hausse des hectares déployés de 53 % en deux ans

L’utilisation des produits phytopharmaceutiques de biocontrôle a toutefois progressé au fil des campagnes agricoles. Le nombre d’hectares traités avec ces solutions a évolué de 7,5 Mha déployés en 2021/2022 à 9,9 Mha déployés en 2022/2023, pour atteindre 11,5 Mha déployés en 2023/2024. Cela correspond à une augmentation de 4 Mha déployés en deux ans, soit une hausse de 53 %, selon le panel réalisé par ADquation auprès de 10 000 agriculteurs.

« Les plus fortes hausses sont enregistrées en vigne avec 3,2 Mha déployés supplémentaires, et en grandes cultures avec 0,7 Mha déployés supplémentaires. Sur les autres segments, c’est à peu près stable », indique Denis Longevialle.

Le secteur viticole affiche une adoption quasi-totale des solutions de biocontrôle : 97 % des viticulteurs utilisent au moins une solution de biocontrôle, et la part de marché du biocontrôle atteint 50 % en hectares déployés.

En grandes cultures, la progression est également tangible : le taux de pénétration atteint 15 % en 2023/2024, contre 12 % en 2022/2023, avec une part de marché inférieure à 5 %, selon Alliance Biocontrôle.

« Réviser en profondeur la séparation de la vente et du conseil des produits phytosanitaires »

Une meilleure valorisation des productions agricoles issues de pratiques durables comprenant l’emploi de solutions de biocontrôle

« L’atteinte de notre objectif de 30 % du marché en 2030 doit passer par une meilleure valorisation des productions agricoles issues de pratiques durables comprenant l’emploi de solutions de biocontrôle, un accompagnement renforcé, une révision en profondeur de la séparation de la vente et du conseil sur les produits phytopharmaceutiques, et des mesures comme le Grand défi biocontrôle et biostimulation pour l’agroécologie lancé au Salon de l’agriculture le 6 février 2024 », explique Denis Longevialle.

Accélérer les homologations en Europe

L’évolution de la réglementation européenne est également perçue comme un levier majeur pour favoriser le déploiement du biocontrôle.

« Nous attendons une reconnaissance officielle dans les textes européens, des mesures spécifiques pour inciter à l’usage de ces solutions, l’accélération de la délivrance des homologations. Quand ces délais sont de 7 à 10 ans en Europe face à des délais de 2 à 3 ans sur le continent américain et d’autres régions du Monde… si rien ne change, il est clair que l’Europe est et sera de moins en moins la priorité pour la mise sur le marché d’innovations de biocontrôle par nombre d’entreprises. Dix États membres ont indiqué lors du conseil européen qu’il fallait accélérer sur la définition du biocontrôle », indique Céline Barthet.

Malgré ces défis, Alliance Biocontrôle reste optimiste. « En Allemagne, deux-tiers des surfaces utilisent la confusion sexuelle contre 15 % en France. Nous avons les solutions : il faut soutenir la transition et le changement de pratique », affirme la présidente d’Alliance Biocontrôle.

Partage du risque : un appel à projets pour les distributeurs au premier semestre 2025

L’organisation espère que le prochain appel à projets PRAAM (Prise de risque amont aval et massification de pratiques visant à réduire l’usage des produits phytopharmaceutiques sur les exploitations agricoles), lancé par le ministère de l’Agriculture au premier semestre 2025, contribuera à cette dynamique. L’appel à manifestation d’intérêt a été publié le 16 juillet 2024. « L’objectif de ce dispositif est de partager le risque. Nos adhérents ne peuvent pas porter de projets : ils seront davantage pilotés par les coopératives et les négoces agricoles », explique Céline Barthet.