Amaïzing, cheminement et enseignements d’un projet de dix ans
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Après dix années de projet, les parties prenantes d’Amaïzing livraient leurs conclusions, du 20 au 22 septembre, à Paris. Avec une idée forte : si le programme a proposé des avancées sur la recherche variétale du maïs, sa thématique centrale, il offre aussi des enseignements plus transversaux sur les projets « longs », encore rares en 2011, date du lancement du programme, mais amenés à se multiplier.
Dix années pour stimuler la recherche variétale du maïs. C’est le format, alors quasiment inédit, du projet Amaïzing, validé en 2010 dans le cadre du premier Programme investissements d’avenir (PIA), et lancé en 2011. Le séminaire de restitution s’est tenu du 20 au 22 septembre à Paris. Au delà des avancées conceptuelles et des outils conçus dans le cadre de ce travail au long cours, les intervenants ont mis en avant les enseignements méthodologiques de ce type de projet.
Déjà des retombées d’Amaïzing chez les semenciers
Chloé Boyard est coordinatrice sélection du maïs au niveau européen pour Limagrain, l’un des partenaires du projet. Selon elle, les sélectionneurs n’ont pas attendu la clôture d’Amaïzing, prévue en novembre 2021, pour s’en inspirer. « Sur ces 10 années, Limagrain a évolué en parallèle d’Amaïzing, explique-t-elle. La prédiction génomique, l’un des axes forts du projet, se fait sa place. Progressivement, nous passons d’une approche davantage basée sur le phénotypage au champ à cette méthode plus efficace mais moins instinctive, car basée sur la modélisation plus que sur l’observation. » Claude Tabel, président de l’UFS, confirme l’idée d’un continuum plutôt que d’une rupture : « Les variétés lancées aujourd’hui ont déjà un peu le goût d’Amaïzing. »
Un contexte en évolution plus ou moins facile à intégrer
Autre enseignement : sur un temps long, les enjeux identifiés au démarrage peuvent évoluer. Et si, en 2010, les enjeux climatiques étaient déjà clairement au goût du jour, leur prégnance s’est clairement accentuée depuis. « Les modélisations d’Amaïzing ont pris en compte toutes les connaissances accumulées en cours de route, notamment sur les hausses de température ou les évènements extrêmes », rassure Jean-Pierre Cohan, chef du service phénotypage par capteurs. Mais Christian Huyghe, directeur scientifique agriculture de l’Inrae, détecte d’autres changements : « La thématique de la transition alimentaire, avec ses dimensions sociales et environnementales, était quai absente en 2010. C’est une évolution moins évidente à greffer en cours de projet. »
Développer les approches trans-filières
De la même manière, plusieurs grands témoins de cette restitution ont mis l’accent sur une réalité : aujourd’hui, l’approche « filière » n’est plus aussi marquée. Alors que les PIA ont financé Amaïzing, mais aussi des équivalents notamment pour la betterave (Aker) ou le blé (BreadWheat), les projets transversaux sont davantage dans l’actualité. « L’agriculture de demain s’écrit sur des systèmes de rotations complexes, affirme Christian Huyghe. Les connaissances accumulées sur une culture doivent s’enrichir de cette approche système. » Pas question, pour autant, de regarder Amaïzing comme déjà passé de mode. « Les travaux centrés sur le génie génétique d’une espèce gardent du sens, rebondit Alain Charcosset, coordinateur du projet pour Inrae. Les méthodes mises en exergue par Amaïzing peuvent tout à fait servir à sélectionner des maïs compatibles avec telle ou telle rotation. »
Partenariat ouvert
Amaïzing, enfin, peut revendiquer des caractéristiques innovantes pour l’époque, et encore jugées pertinentes à l’avenir. En particulier, l’implication de laboratoires publics (Inrae et Geves) et d’un institut technique avec huit sociétés privées et coopératives. Ces dernières ont pu apporter leur contribution à la recherche tout en apportant un regard « attentes du marché » en direct aux scientifiques. « L’ensemble des partenaires a tiré parti de ce format, affirme Christian Huyghe. Et demain, il conviendra sans doute d’élargir encore le cercle des contributeurs, notamment pour une prise en compte plus intégrée des enjeux sociétaux de l’alimentation. »