Un programme de recherche pour mieux comprendre les impacts de l’agroforesterie en grandes cultures et viticulture
Le | Recherche-developpement
Lancé fin 2022 pour cinq ans, le projet Ac²tion, copiloté par Inrae et l’Association française d’agroforesterie, a pour ambition de mieux appréhender l’impact de l’agroforesterie sur les filières viticole et de grandes cultures. La Chambre de Charente-Maritime et les Vignerons de Buzet sont associés à la démarche.
Un nouveau plan national attendu en début d’année, une méthodologie label bas carbone en cours de rédaction, des projets associant des coopératives et des négoces… l’intérêt pour l’agroforesterie se développe. Des références manquent cependant encore pour structurer son déploiement de manière généralisée. Le projet Ac²tion, financé par Inrae et la Région Nouvelle-Aquitaine, porte ainsi l’ambition d’en savoir plus sur les liens entre l’agroforesterie et les grandes cultures, d’une part, et la viticulture, d’autre part.
« Nous avons déjà beaucoup de références sur l’agroécologie et l’élevage, et beaucoup de recherches ont été menées en climat méditerranéen ou tropical, mais peu en climat océanique, explique Laurence Denaix, directrice de recherche chez Inrae et coordinatrice du programme. Un des bienfaits reconnus de l’agroforesterie est de moduler les effets microclimatiques, cela nous a donc paru important d’avoir des références régionalisées. »
Un projet à l’approche systémique
Les axes du projet, qui s’étalera sur cinq ans, ont été co-définis avec les partenaires de l’initiative, à savoir l’Association française d’agroforesterie (Afaf), autre co-pilote d’Ac²tion, la Chambre d’agriculture de Charente-Maritime, et les Vignerons de Buzet. L’approche globale se veut systémique. « Mettre des haies dans un champ provoque des effets en cascade. Par exemple : la hausse de la biodiversité induite, qui peut-être bénéfique avec l’installation d’auxiliaires de cultures, peut aussi servir de refuge à des pathogènes, souligne Laurence Denaix. Nous voulons étudier les impacts positifs et négatifs de cette pratique. »
Pour la filière viticulture, les Vignerons de Buzet mettront à disposition leur vignoble expérimental NewAge. La Chambre de Charente-Maritime, pour sa part, mobilisera des agriculteurs en grandes cultures. « Nous allons essayer de travailler avec les agriculteurs pour imaginer des indicateurs plus simples à mesurer, afin qu’ils puissent réaliser des mesures eux-mêmes et que cela enrichisse notre base de données », précise Laurence Denaix.
Mesurer la valorisation économique possible de l’agroforesterie
Dans le détail, les travaux seront divisés en quatre volets. Le premier concerne l’identification des pratiques existantes et les questions remontant du terrain. Le deuxième s’intéressera aux processus impliqués, alliant micro-météorologie, biologie, agronomie, science du sol, écologie jusqu’à l’économie et la valorisation du produit : est-ce qu’avoir un produit issu d’une parcelle en agroforesterie est vue de manière positive par le consommateur ? Sera-t-il prêt, notamment pour la filière viticole, à payer plus ?
Une fois des éléments de réponses obtenus sur ces deux premiers volets, les travaux porteront sur leur quantification. Celle-ci passera par une évaluation des services écosystémiques rendus par les systèmes agroforestiers, en grandes cultures et en viticulture, et une analyse multicritère pour l’aide à la décision. Enfin, le dernier volet sera davantage prospectif. « Les arbres plantés aujourd’hui s’adapteront-ils au climat de demain ? Nous voulons en savoir plus sur la résilience de l’agroforesterie, en réfléchissant sur les meilleures essences à implanter aujourd’hui », indique Laurence Denaix.
Un séminaire de lancement prochainement
Ces travaux devraient se dérouler sur cinq ans, en dédiant la dernière année uniquement à la valorisation des résultats obtenus, vers les étudiants de cursus agricoles, les citoyens et les décideurs politiques. Dans la pratique, ces deux missions devraient être menées de front. « Nous souhaitons pouvoir discuter rapidement de nos résultats avec les acteurs de terrain », assure Laurence Denaix.
Un séminaire de lancement du projet Ac²tion devrait être organisé en ce début d’année. Un site internet est également en cours de finalisation.
Un programme de recherche régional
Laurence Denaix est animatrice régionale, pour la Nouvelle-Aquitaine, du programme de recherche Tetrae, cofinancé par Inrae et plusieurs Régions. Le projet Ac²tion est l’un des deux projets financés, à l’échelle de la Nouvelle-Aquitaine, dans ce cadre. Il doit notamment permettre de faciliter le déploiement de l’agroforesterie dans cette région, où elle est encore très peu développée. « Les effets de l’agroforesterie sont bien connus, mais ils sont encore mal quantifiés, remarque Laurence Denaix. Or, cela est essentiel pour généraliser une pratique. »