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Face aux députés, la directrice de la DGAL fait le tour de l’actualité phyto

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Auditionnée par la commission d’enquête sur l’échec des plans Écophyto de l’Assemblée nationale, Maud Faipoux, directrice générale de l’alimentation au ministère chargé de l’agriculture, est revenue sur toute l’actualité relative aux produits phytosanitaires. Stratégie Écophyto 2030, plan d’anticipation de retrait de substances actives, délivrance des AMM par l’Anses, concurrence déloyale… les informations ne manquent pas. 

Face aux députés, la directrice de la DGAL fait le tour de l’actualité phyto
Face aux députés, la directrice de la DGAL fait le tour de l’actualité phyto

Après l’Efsa et l’Anses, c’est au tour de la DGAL d’être auditionnée par la commission d’enquête sur l’échec des plans Écophyto de l’Assemblée nationale. Sa directrice générale, Maud Faipoux, a répondu, le 27 septembre 2023, aux nombreuses questions des députés. Retour sur ses principales réponses.

→ Stratégie Écophyto 2030 : première trame dans les 15 jours

« L’objectif est d’avoir un document qui prenne le relais d’Écophyto 2+, qui arrive à échéance de ses cinq ans au printemps 2024 », a précisé Maud Faipoux. La directrice de la DGAL a informé que les travaux ont démarré, sous l’égide du secrétariat général à la planification écologique, service rattaché à la première ministre, qui coordonne les travaux interministériels sur le sujet. « Ce qui est envisagé, après le premier tour de concertations réalisé, c’est que le Gouvernement puisse proposer une première trame de stratégie dans la deuxième quinzaine d’octobre », a-t-elle avancé. Des travaux de concertations seront alors officiellement lancés afin d’affiner la stratégie pour « la fin d’année, tout début d’année prochaine ». À noter que le Gouvernement ne parle plus de « plan » mais de « stratégie ».

→ Fin de la logique de substitution

« La France est le premier pays qui se soit assigné un objectif ambitieux de réduction, a tenu à rappeler Maud Faipoux. Depuis 15 ans, tous les travaux ont permis une sensibilisation très forte de l’ensemble des acteurs sur les impacts que ces produits ont sur la santé, sur l’environnement. » Selon la directrice générale de la DGAL, cette dynamique « engage l’ensemble des acteurs vers la réduction des usages et des impacts ». Reste désormais à « passer un cap », pour déployer les connaissances auprès de l’ensemble des agriculteurs.

Pour Maud Faipoux, il est désormais nécessaire de sortir de la logique du « on substitue un produit par un autre », et d’aller vers une reconception des systèmes. « Ça va être un point fort de la stratégie Écophyto 2030 telle qu’on la conçoit, pour préparer collectivement l’ensemble des agriculteurs, l’ensemble des filières à faire émerger puis développer des solutions alternatives pour certains usages », a-t-elle précisé. Et de souligner que cette reconception des systèmes doit se faire en raisonnant les enjeux globaux d’une exploitation, en prenant en compte les débouchés pour les nouvelles cultures nécessaires aux modifications d’assolement, la résilience face changement climatique, la production de carbone…

→ L’anticipation du retrait des substances pleinement intégrée à Écophyto

« On essaie d’avoir des solutions avant d’interdire, a souligné Maud Faipoux. C’est tout l’intérêt du plan d’anticipation, de préparation au retrait de certaines substances. » Un plan dont les résultats seront accrochés à la stratégie Écophyto 2030. La directrice générale de la DGAL a rappelé qu’une part importante des 250 substances qui vont repasser par la procédure de réévaluation dans les cinq ans ne sera pas renouvelée. Les 75 molécules proposées par le Gouvernement ne sont pas « une fin en soi » pour la directrice générale de la DGAL. « On sait que si une molécule ne risque pas d’être renouvelée à l’horizon de 3, 4, 5 ans, il faut lancer le compte à rebours et dès aujourd’hui se mettre en recherche de l’alternative, a-t-elle affirmé. Ce que l’on propose est d’être proactif et de s’y préparer. » Et de préciser que le Gouvernement y met les moyens financiers, puisque 250 M€ seront octroyés en 2024 pour la mise en œuvre d’une stratégie de l’utilisation de produits phytosanitaires.

→ Pas de remise en cause de la délivrance des AMM par l’Anses :

Maud Faipoux s’est montrée catégorique : « Le fait que l’évaluation et la gestion des risques, en tout cas la délivrance des autorisations de mise sur le marché, qui depuis 2016 est dévolu à l’Anses, n’a pas vocation à être remise en cause. »

La directrice générale de la DGAL dit en revanche travailler, depuis cet été, avec l’Anses et ses homologues européens, sur une potentielle actualisation des modèles européens servant actuellement à l’évaluation des risques. Et ce, afin de prendre en compte les avancées technologiques pour affiner les conditions d’utilisation des produits phytosanitaires. Maud Faipoux a donné l’exemple des matériels anti-dérives : « Le modèle ne prend en compte que des anti-dérives de 50 % alors qu’on voit dans les catalogues des matériels qui sont beaucoup plus performants. »

→ Règlement SUR : absence de visibilité sur les travaux européens

Maud Faipoux a informé, concernant le règlement SUR, que de nombreux chantiers étaient encore en débat. « On a une visibilité toute relative sur l’issue de ces travaux dans la perspective des élections européennes de l’année prochaine », a-t-elle souligné. Raison pour laquelle, selon elle, « l’enjeu de calendrier de la stratégie Écophyto 2030 n’est pas tant lié au projet de règlement SUR ». La stratégie française prendra en compte ce vers quoi les travaux européens s’acheminent, mais sera lancée avant le règlement européen.

→ Des mesures miroirs pour limiter les concurrences déloyales

Afin de mettre un terme aux concurrences déloyales et à l’importation de denrées produites avec des spécialités phytosanitaires interdites en Europe, Maud Faipoux compte sur les limites maximales de résidus (LMR). « Ce que la France défend au titre du règlement SUR, c’est de dire que si l’Europe a interdit un produit, il faudrait abaisser ces LMR aux limites de quantification », a-t-elle informé. Pour les denrées dans lesquelles aucune trace ne peut être décelée, la directrice générale de la DGAL envisage des mesures miroirs. « On a un exemple au niveau européen qui a été fait sur ce modèle, c’est l’interdiction d’import de viandes utilisant certains antibiotiques, a-t-elle spécifié. Il y a des filières qui sont certifiées, auditées sur place par la Commission européenne. Seules ces filières peuvent exporter vers l’Europe. C’est une position qui pourrait être transposée sur les produits phytos. »

→ Lire également : Maud Faipoux, DGAL, « Bientôt un décret pour délivrer temporairement le Certiphyto sans conseil stratégique »