CarbonExtract, objectif 20 000 exploitations accompagnées d’ici à cinq ans
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Accompagner les agriculteurs et leurs conseillers dans une trajectoire carbone vertueuse, c’est l’objectif d’Agrosolutions, avec l’outil CarbonExtract. Le cabinet d’expertise souhaite que son outil devienne une référence pour les projets s’inscrivant dans le Label bas-carbone ou dans la démarche « Bon diagnostic carbone ». Centré sur les grandes cultures, l’outil devrait à terme inclure d’autres méthodologies du Label bas-carbone.
Le cabinet d’expertise Agrosolutions ne cache pas ses ambitions pour son outil de diagnostic en grandes cultures, CarbonExtract, commercialisé depuis septembre dernier. « Nous souhaitons qu’au moins 20 000 exploitations soient accompagnées au cours des cinq prochaines années, et faire de CarbonExtract l’outil de référence pour le déploiement de la stratégie nationale bas carbone », explique Morgane Hénaff, qui pilote l’outil chez Agrosolutions, lors d’une conférence de presse organisée dans la Marne le 30 novembre. Cela passe notamment par l’accompagnement de projets dans le cadre du Label bas-carbone ou la réalisation de bons diagnostics carbone. Pour l’heure, 180 conseillers agricoles ont été formés au sein d’une cinquantaine de structures de conseil, notamment des coopératives et des chambres d’agriculture. 500 diagnostics ont ainsi été contractualisés depuis septembre.
Apporter de l’autonomie aux structures de conseil
Agrosolutions n’est cependant pas seul sur ce terrain, d’autres outils ou démarches, comme Soil Capital ou le projet porté par Rize, progressant aussi. « Ces outils se concentrent surtout sur la vente de crédits carbone, réagit Morgane Hénaff. Notre but est plutôt de permettre aux agriculteurs et à leurs conseillers de construire, solidement et de manière autonome, leur projet. » Le cabinet de conseil assure également voir plus large et plus loin que ses concurrents. « CarbonExtract doit être un support de réflexion ne se limitant pas qu’au spectre carbone, poursuit la pilote de l’outil. Des indicateurs sur le climat, la biodiversité, la qualité de l’eau, l’économie, sont également proposés. » L’ambition est ainsi, à terme, d’inclure d’autres méthodologies validées dans le cadre du Label bas-carbone, à savoir : CarbonAgri pour l’élevage, celle sur la plantation de vergers et celle sur la viticulture, en cours de finalisation. « L’objectif est de proposer un seul et même outil pouvant couvrir tous les ateliers d’une exploitation, et permettant de mieux répondre aux demandes grandissantes de l’agro-alimentaire », justifie Morgane Hénaff.
Donner des clés de compréhension
Concrètement, CarbonExtract est composé de quatre modules :
- le bilan carbone initial de l’exploitation ;
- un simulateur de changement de pratiques précisant le pourcentage de progression du bilan carbone envisageable en fonction des leviers activés, et les crédits carbone espérés ;
- la trajectoire définie avec un panel d’indicateurs ;
- un suivi année après année.
« Cela permet de mettre en avant des évolutions de pratiques qui n’avaient pas été envisagées, ou alors de se rendre compte des réels effets des différents leviers : en somme de donner des clés de compréhension », assure Morgane Hénaff.
L’épineuse question du financement du changement de pratiques
L’EARL Bournaison, une exploitation de 700 hectares en grandes cultures et légumes où la présentation avait lieu, a recours à l’outil CarbonExtract. Une première simulation, reposant sur le recours à l’électrique pour l’irrigation, le développement des haies et de couverts - des évolutions envisagées par l’exploitation - aboutit à une réduction de 20 % du bilan net carbone. Selon une seconde simulation, des efforts sur la fertilisation, l’association des cultures, les rotations ou la gestion des résidus de culture pourraient diviser par deux le bilan net. « Cela demande néanmoins beaucoup de travail, et à quel coût ? interroge Gauthier Lacour, l’ingénieur Agrosolutions qui a réalisé ces simulations. Nous avons des méthodes, des agriculteurs volontaires, tout ce qui manque pour enclencher la dynamique est le financement des crédits carbone, les exploitants ne vont pas s’engager à perte. »
Mobiliser le secteur privé
« Le carbone n’est pas assez rémunéré, regrette Julien Bournaison, l’un des propriétaires de l’exploitation. Nous nous demandons s’il faut rentrer dès maintenant dans une démarche bas carbone ou attendre que le prix monte. Pour nous, la tonne devrait être valorisée à 60 €, soit deux fois plus qu’aujourd’hui. » Face à cette situation, Morgane Hénaff plaide pour un multi-financements des projets, associant subventions publiques et financements privés : « La Poste compense 100 % de ses émissions mais à l’étranger, comme l’offre française était inexistante jusqu’à récemment. Le secteur privé doit se mobiliser pour accompagner la transition. » La pilote de l’outil se montre néanmoins optimiste. « Nous n’en sommes qu’aux balbutiements, ce marché est très récent. Pour amorcer la pompe, les agriculteurs doivent être en mesure de fournir des informations sur le potentiel carbone de leur exploitation, les premiers diagnostics ont un rôle à jouer. »